Une ascendance déterminante
Winston Churchill est issu de l’aristocratie britannique la plus illustre par son père, et le petit-fils du propriétaire américain du New-York Times par sa mère.
Une ascendance qui détermine sans doute son engagement constant en faveur de l’amitié anglo-saxonne, entre les peuples britanniques et américains.
Des débuts impopulaires et controversés
Après une carrière militaire, surtout comme correspondant de guerre, Winston Churchill se lance en politique, en 1900, comme député conservateur.
Ministre du Commerce en 1908, il rallie le camp du radicalisme et de la démocratie sociale. Il limite la journée de travail dans les mines, lutte contre l’exploitation du prolétariat et le chômage, et soutient avec vigueur la taxation des riches.
Ministre de l'Intérieur (1910-1911), puis de la Marine (1911-1915), il est rendu responsable de l’échec de .
Son impétuosité et ses changements d’allégeance (il repasse au parti conservateur en 1924) déconcertent et entament sa réputation d’homme d'État responsable.
Battu aux élections législatives en 1922 et paralysé par une crise d'appendicite, il déclare - non sans humour – qu’il est « sans portefeuille, sans mandat, sans parti… et sans appendice. »
Lors des grèves suivant la , il affronte les syndicats qui l'exècrent.
Fermement opposé au bolchevisme qui, selon lui « n'est pas une doctrine politique, mais une maladie », il cultive le conservatisme le plus ferme.
Il montre aussi une totale fermeture à l'évolution des colonies britanniques – dont les Indes - vers l'autonomie.
Un chef de guerre héroïque
Plus perspicace que quiconque sur les dangers de l'Allemagne hitlérienne, Churchill ne parvient à convaincre l'opinion qu’en 1939.
En 1940, sa popularité est à la mesure de son impopularité deux ans plus tôt.
Premier ministre, il organise la résistance sur tous les fronts, galvanisant les énergies et les foules.
Aux côtés des États-Unis entrés en guerre en 1941, il est un acteur phare du et de la victoire alliée.
La fin de la guerre est marquée par une dégradation des relations entre Londres et Moscou, depuis (février 1945).
Textes de Jean-François Muracciole, Professeur des Universités en histoire contemporaine.
L’expédition des Dardanelles.
Au début de 1915, les alliés franco-britanniques tentent de sortir de l’impasse stratégique dans laquelle la guerre est tombée sur le front occidental. En effet, après la fin de la guerre de mouvement (été-automne 1914), les deux armées s’enterrent dans les tranchées sans perspective de percée. Les Britanniques, et particulièrement le bouillant ministre de la Marine Winston Churchill, envisagent une opération périphérique, tout à fait dans la longue tradition de la stratégie britannique. Il s’agit de forcer le passage des détroits turcs (Dardanelles et Bosphore) qui commandent l’accès à la mer Noire. L’affaire présente un double avantage : en s’en prenant au plus faible des grands alliés de l’Allemagne, on espère ainsi faire éclater la coalition des Empires centraux. En outre, ouvrir les détroits permettrait de ravitailler plus facilement la Russie, et de renforcer ainsi la menace à l’est contre l’Allemagne. Pilotée par les Britanniques, mais avec une forte participation française, l’opération tourne au désastre. Plusieurs navires sautent sur des mines et les Turcs, dirigés par le général Mustafa Kemal (futur Atatürk), repoussent le débarquement opéré à Gallipoli. Après dix mois de combat et de lourdes pertes (dues autant aux combats qu’à la maladie), Français et Britanniques doivent se résoudre à rembarquer leurs troupes et à les transporter à Salonique (octobre 1915), dans le nord de la Grèce, dans l’espoir à présent de forcer la Grèce à entrer en guerre et de menacer la Bulgarie, autre alliée de l’Allemagne. En vain.
Winston Churchill, Lord de l'Amirauté (Ministre de la Marine) britannique, Londres 1913.
Le débarquement allié du 6 juin 1944.
L’opération Overlord a longtemps suscité l’opposition des Britanniques et de Churchill pour des raisons à la fois militaires (refus d’affronter la Wehrmacht dans une bataille rangée) et politico-stratégiques (préférence pour des opérations périphériques qui donnent l’avantage au théâtre méditerranéen ; jusqu’au bout Churchill plaidera pour un débarquement dans les Balkans). Mais les Américains, soucieux de soulager l’Armée rouge et de terminer la guerre au plus tôt, imposent le principe d’un grand débarquement en Europe du nord-ouest de façon à prendre la Ruhr, le cœur économique de l’Allemagne. Les Alliés en font l’annonce et la promesse à Staline lors de la conférence de Téhéran en novembre 1943. Après des mois d’une minutieuse préparation, l’opération est placée sous les ordres du général américain Eisenhower. Le choix se porte sur la Normandie, région qui présente le double avantage de surprendre les Allemands (qui attendent un débarquement dans le Pas de Calais) et de s’appuyer sur le port de Cherbourg. Précédé par des largages massifs de parachutistes (trois divisions), le débarquement jette environ 60 000 hommes, au matin du 6 juin 1944, sur cinq plages normandes, entre les embouchures de l’Orne et de la Vire. En dépit de pertes sévères à Omaha Beach (plus de 3000 morts américains), la tête de pont est établie rapidement. Mais la vigueur de la réaction allemande, de même que la configuration du bocage normand favorable à la défensive, conduisent les Alliés à longtemps piétiner malgré la prise rapide de Cherbourg (26 juin). La bataille de Normandie dure ainsi presque trois mois, la percée n’intervenant à Avranches (28 juillet) et finalement à Falaise qu’autour du 10 août. Dès lors, les divisions blindées mécanisées alliées peuvent se ruer vers la Bretagne (Rennes est libérée le 4 août, Nantes le 10) et les plaines du bassin parisien. Paris accueille ses libérateurs le 24 août 1944.
Opération Overlord. Camp de prisonniers de guerre allemands entouré de barbelés sur Omaha Beach.
Calvados, 10 juin 1944.
La conférence de Yalta.
Tenue en Crimée, dans le sud de la Russie, du 4 au 11 février 1945, la conférence de Yalta réunit pour la seconde fois Roosevelt, Churchill et Staline après la rencontre de Téhéran (novembre 1943).
Au moment où la bataille finale est largement engagée en Europe, la conférence est l’occasion de régler les dernières questions en suspens. Alors que l’Armée rouge a déjà pénétré sur le sol allemand et qu’elle contrôle la quasi intégralité de l’Europe orientale, les Trois Grands admettent le principe d’une avancée de 200 km vers l’ouest de la frontière soviétique (ce qui correspond peu ou prou à la ligne Curzon de 1919 et à la frontière du pacte germano-soviétique de 1939), la Pologne étant dédommagée par un recul similaire de la frontière allemande sur la ligne Oder-Neisse. Concernant l’Allemagne, la conférence retient la division en zones d’occupation, une profonde dénazification et le paiement de lourdes réparations. En contrepartie, Staline accepte de signer une « Déclaration de l’Europe libérée » qui promet partout des élections libres, mais il impose le Comité de Lublin communiste au cœur du jeu politique polonais. De son côté, Roosevelt (qui ne sait à quelle date l’arme atomique sera opérationnelle) a besoin des Soviétiques pour terminer la guerre au plus vite en Asie. Staline accepte, 90 jours après la fin de la guerre en Europe, de rompre le pacte de non agression qui le lie au Japon depuis avril 1941 et de déclarer la guerre à ce dernier. En échange, l’URSS recevra les îles Kouriles et le sud de Sakhaline. Enfin, Churchill, soucieux d’éviter à l’empire britannique de se retrouver seul après la guerre face aux deux grandes puissances anticolonialistes, obtient un spectaculaire retour de la France (pourtant pas invitée à la conférence) au rang des grandes puissances. Il arrache pour la France une zone d’occupation en Allemagne et un siège de membre permanent au Conseil de Sécurité de la future ONU. En contrepartie, Staline impose le droit de veto pour les cinq membres permanents du Conseil.
Contrairement au mythe tenace véhiculé par les gaullistes et les républicains américains, la conférence de Yalta, qui s’est déroulée dans un esprit de bonne coopération, n’a en rien opéré un partage du monde ou de l’Europe.
Guerre 1939-1945. Conférence de Yalta. Winston Churchill, Franklin Roosevelt et Joseph Staline, 4-11 février 1945.
Crise de 1929
Déclenchée par le krach boursier de Wall Street du 24 octobre 1929 (le « Jeudi noir »), la crise des années 1930 est la plus grave que le capitalisme ait connue. La crise est d’abord financière et américaine par l’éclatement d’une bulle spéculative formée à la fin des années 1920. L’ampleur du krach et la fragilisation du système financier (6000 banques américaines font faillite de 1929 à 1933) transforment vite la tornade financière en crise économique en raison de l’arrêt brutal du crédit. En 1932, les Etats-Unis comptent 13 millions de chômeurs et le PIB a chuté de 35%. La crise s’étend aussi au monde par le brusque retrait des capitaux américains. L’Allemagne, directement touchée, compte 7 millions de chômeurs en 1932.
Face à la crise, les Etats ont été incapables de développer des politiques coopératives et se sont réfugiés dans des mesures unilatérales : vague sans précédent de protectionnisme (qui provoque une chute de 50% du commerce mondial), dévaluations agressives (la livre de 30% en 1931, le dollar de 40% en 1934, le franc de 50% entre 1936 et 1938), tentation autarcique (en particulier en Allemagne), repli sur les domaines coloniaux (Grande-Bretagne, France). La crise constitue incontestablement un maillon important dans la chaîne de causalité qui conduit à la Seconde Guerre mondiale.
La crise est aussi l’occasion d’une révolution de la pensée économique. L’économiste britannique John Maynard Keynes publie en 1936 la Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie qui préconise des politiques de relance par le déficit budgétaire de l’Etat.